La piscine Molitor est un lieu exceptionnel. Une piscine qui a ouvert ses portes pour les plus anciens des Parisiens, et depuis, un squat de graffeurs assez incroyable où se sont déroulées les plus exceptionnelles soirées dans un univers étonnant, entre friche urbaine et explosion de couleurs…
Aujourd’hui, Molitor a fait l’objet d’une incroyable restauration.
C’est en 1929 que Molitor a offert ses charmes art décor aux baigneurs parisiens. A l’époque, c’était l’endroit où voir et être vu, en maillot ou en manteau, puisque la partie couverte se transformait en patinoire chaque hiver. Comme le veux la tradition des lieux chics parisiens, Molitor a aussi été le lieu où la mode s’est fait : c’est ici que le premier bikini a fait son apparition en 1946, pour le bonheur de tous les hommes et de toutes les belles poitrines!
La fin du XXème siècle a été moins glorieuse pour ce monument art déco, et en 1989, la Mairie de Paris a décidé de le fermer pour laisser la place à un projet immobilier. Mais l’association SOS Molitor a empêché la destruction du bâtiment. Par contre, personne ne s’est occupé de l’entretien de ce monument historique, laissé à l’abandon, aux skaters et aux graffeurs, survivant seulement grâce à l’obstination de l’association.
Aujourd’hui, après des années de travaux, le groupe Accor réouvre Molitor, dans une livrée quasi conforme à l’originale. Un travail de restauration impressionnant, pour un montant d’environ 80 millions d’euros (supportés par le fonds d’investissement Colony Capital), où le bâtiment original se voit toiletté et surmonté d’un hôtel de luxe. Mais là où le travail de restauration et de réanimation est exemplaire, c’est parce qu’outre laisser des perspectives conformes à celles de 1929 (alors que presque tout a dû être reconstruit), le nouveau lieu prend en compte le passé récent du bâtiment avec des éléments de street art cachés dans les vestiaires ou développés dans les chambres ou le lobby de l’hôtel. Jean-Philippe Nuel, le designer responsable de la transformation, a réussi à recréer une narration visuelle des 85 ans d’histoire de la piscine parisienne. Molitor est ressuscitée, réincarnée, et vit une nouvelles vie pour au moins quelques décennies.
Aujourd’hui, Molitor fait l’objet d’une nouvelle polémique bien inutile : certains s’insurgent des tarifs élitistes de l’entrée pour les non résidents de l’hôtel… Mais si la piscine est si chère aujourd’hui (180€ l’accès, ou encore un droit d’entrée de 3300€), c’est bien parce que les travaux ont coûté une fortune et que l’investisseur privé doit bien espérer une rentabilité. Aucun fonds public n’a été dépensé, et les résidents de l’hôtel n’ont peut-être pas envie d’avoir une chambre qui donne sur une piscine publique pleine à craquer. Finalement, un tarif élitiste reste conforme à l’histoire du lieu : un temple du chic parisien!
Crédits photo : Alexandre Sauria pour les photos de la version restaurée, Bibliothèque Nationale de France pour les photos historiques, Thomas Jorion pour la version friche urbaine.